Covid-19 : qu’advient-il des loyers reportés pour les professionnels ?

Covid-19 : qu’advient-il des loyers reportés pour les professionnels ?

Dernière mise à jour le 27 avril 2023
vue de la Tour Eiffel et des invalides
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Pendant la crise de Covid-19, le Gouvernement a demandé aux fournisseurs d’électricité et de gaz et aux bailleurs d’accorder des reports de loyer et de factures aux TPE. Au terme de cette crise, des entreprises concernées par les reports de loyer ont saisi la justice, pour demander la suspension, la diminution voire même la neutralisation de la dette cumulée pendant cette période.

Depuis le 15 juin 2022 la Cour de cassation a tranché. Les locataires devront bel et bien s’acquitter des loyers reportés par les bailleurs. Dans cet article, l’équipe Vecteur Immobilier vous propose de découvrir les arguments de chacune de ces deux parties. Nous faisons aussi le point sur les effets de cette décision historique.

Les reports de loyer : une mesure essentielle

La possibilité de pouvoir reporter certaines des charges fixes a permis de sauver des entreprises de petite taille de cette crise. En effet, avec les périodes de confinement, nombreuses sont celles qui auraient dû mettre la clé sous la porte, si elles avaient dû continuer à assumer leurs charges. 

Dans le Journal officiel du 26 mars 2020, il est également indiqué qu’aucune pénalité financière ou intérêt de retard ne doivent être opposés aux locataires, s’ils ont disposé de cette possibilité de report. À l’époque, aucun document ne faisait mention de la possibilité d’annuler les loyers dus, en invoquant un cas de force majeure par exemple.

Les arguments des TPE locataires

Pour les TPE ayant demandé une annulation des loyers ou encore une réduction de ces derniers pendant les périodes de confinement, il était parfois évident que le Covid-19 représenterait un cas de force majeure. D’autres ont invoqué un manquement du bailleur à son obligation de délivrance. Pour rappel, lorsque le bailleur ne répond pas aux conditions du contrat, le locataire peut se prévaloir du mécanisme de l’exception d’inexécution. Cela lui permet de ne pas payer les loyers pendant la période où le contrat n’est pas exécuté par l’autre partie.

Pour finir, certains avocats de locataires ont tenté d’invoquer une perte de la chose louée, au sens de l’article 1722 du Code civil. Grâce à cette loi, il est possible de bénéficier d’une réduction du loyer, correspondant à la période pendant laquelle le locataire n’a pas pu utiliser le bien comme le prévoit le contrat. Le point commun de tous ces arguments semble être de pointer une responsabilité de la part des bailleurs. C’est donc, entre autres, sur cette question que la Cour de cassation a eu à trancher.

Les arguments des bailleurs

La défense des bailleurs était donc toute trouvée. La mesure selon laquelle les commerces ne pouvaient plus accueillir de public n’était pas du fait de ces derniers. Ils ne sont pas responsables des conséquences financières entraînées par la décision gouvernementale. On ne peut donc pas les accuser d’une quelconque inexécution.

La décision de la Cour de cassation

Pour résumer la décision de la Cour de cassation en faveur des bailleurs, vous pouvez retenir que :

  • La force majeure n’a pas pu être retenue en faveur des locataires, à cause de l’absence de caractère définitif. C’est en effet ce dernier qui est susceptible d’entraîner la résolution du contrat et la libération des parties de leurs obligations respectives.
  • La perte de la chose louée n’a pas pu être invoquée, puisque l’interdiction de recevoir du public en période de crise sanitaire n’entre pas dans le cadre de l’article 1722 du Code civil. En effet, cette interdiction a été qualifiée de générale et temporaire, et surtout sans lien direct avec la destination du local loué. Aucune possibilité de réduction du coût du loyer n’a donc été permise suite à la période de fermeture.
  • Pour ceux dont la défense se basait sur l’obligation de délivrance, s’agissant d’une mesure générale, l’interdiction de recevoir du public n’était pas constitutive d’une inexécution du bailleur dans son obligation de délivrance. L’exception d’inexécution n’était donc pas envisageable.

On retient aussi qu’il a été considéré que les bailleurs étaient de bonne foi, dès lors qu’ils avaient proposé une solution de report au locataire. Si certains d’entre eux ont choisi de proposer des facilités de paiement suite à la réouverture, les autres n’ont pas été condamnés, s’ils ont exigé le paiement des loyers dès le mois d’avril 2020. Cette décision de la Cour de cassation est historique, puisqu’elle renforce l’impossibilité d’un recours contre un bailleur, quand un phénomène externe, autre qu’un cas de force majeure, entraîne une incapacité à jouir d’un local commercial.

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